Après 7 ans... [PV Ezechiel]

Première respiration.
Elle est de retours.. Elle reconnait sans mal l'immense château qui lui avait servit de demeure quelques années auparavant.
En une seconde, une vague de souvenirs la submergeai. Des souvenirs agréables, douloureux, des souvenirs de jeunesse, de larme, de joie.
Sa gorge se serra si fort qu'elle eut du mal à se lever. Elle sortit du couche. Le soleil l'éblouit et en un claquement de doigt, fit apparaitre un nuage noir juste devant. Des gouttes de pluie tombait déjà.
Maintenant, elle était chez soi...
Elle mit quelques secondes avant de faire un pas. Elle observait l'habitat, un brin de nostalgie dans le coeur...
Emmitouflée dans son énorme manteau noir, elle s'avança enfin vers la porte d'entrée. Des gardes l'ouvrirent, et Philomène leurs jeta un regard des plus noirs.
Elle vit l'allée. Cette grande allée si majestueuse, avec ses tableaux, ses ancêtres, ses armures, ses meubles... A gauche, le salon, a droite la salle des repas.
La gamine eut l'impression qu'elle n'avait jamais vraiment quitter le domaine. Qu'elle était juste sortit faire un tours, comme elle aimait faire dans son enfance...
Mais non... Cela faisait sept ans qu'elle n'avait pas remis les pieds ici.
Tout à tellement changer en sept ans... Elle n'en reviens pas.
Jetant un oeil discret par dessus son épaule, elle remarqua son frère, qui avançait, tout comme elle.
Sentait t'il la même gène en entrant ? Philo ne le savait pas.. Mais de toute façon, qu'important.
Elle ne voulait pas savoir si le fameux héritier avait encore une once de coeur !
Parce que, après tout, c'était LUI que les parents avaient choisi pour reprendre le pouvoir de la ville et des quartiers.
C'était lui, qui avait le rôle le plus important. C'était lui, le plus grand sang-pur de tous les temps !
Alors, elle ne considérait plus Ezechiel comme son frère depuis sept ans.
Pourtant, en grimpant les escaliers, elle aurait aimer que ça soit la main de son frère qui tienne la sienne, pour se réchauffer mutuelement, pour se soutenir dans cette étape difficile. Elle aurait aimer qu'il lui fasse uns de ses sourires doux qu'il lui faisait Philomène enfant.
Elle aurait aimer... Mais était bien trop fière pour se l'admettre !
Parcourant l'escalier, elle arriva au seuil. Deux chambres à droites, trois à gauche, plus des salles de toilettes.
Philomène entra dans la piéce qui lui servait de chambre quand elle était jeune, et fit signe au personnel de partir. Elle se dirigea vers la seconde chambre.
Elle posa sa main sur la poignée, l'ouvrit doucement.
Et quand elle s'ouvrit, ce n'était pas du tout ce que Philomène c'était imaginer.
Pensait t'elle revoir le cadavre de ses parents ? Pensait t'elle vraiment que rien aurait été nettoyer ?
Mais tout était propre, tout brillait.
La jeune femme soupira, baissa les yeux, et repensa à cette nuit tragique qui avait bouleverser son existence.
Une larme coula le long de sa joue blafarde. Elle passa le revers de sa manche dessus, et redescendit en bas.
Elle croisa le regard de son frère. Un regard froid et vide.
Ou était passer le Ezechiel d'avant ?
Malgré elle, Philomène savait très bien que c'était de sa faute, si un vide les séparaient, tous les deux...

Sept ans...

La route avait été longue, très longue...Ils étaient donc partis si loin de la Maison? Le grand jour était arrivé, ce jour que le vampire avait tant attendu ces dernières années durant. Les yeux rivés sur le paysage tout le long du trajet, il avait gardé le silence, observant inlassablement ces multiples paysages qui défilaient sous ses yeux, combien de temps avait-il passé à cette occupation? Lui même n'aurait su le dire, bien trop préoccupé par ce qui allait suivre, par son retour et celui de sa soeur à qui il n'avait pas adressé un mot depuis leur départ. La situation était tendue, et ce, depuis un moment déjà... Mais à quoi bon? Ezechiel avait d'autres projets en tête, dont le premier était de récupérer la place qui lui revenait de droit: celle d'un Prince, cette place abandonnée sept ans plus tôt pour partir en cavale, laissant derrière eux une société en deuil, croyant fermement à la mort des deux héritiers. Quelle surprise. Leur annonce avait déjà fait l'effet d'une bombe au sein de la communauté, mais leur retour...

Le carrosse s'arrêtait enfin... La gorge du vampire se noua, il était finalement de retour après tout. Différents souvenirs resurgirent brutalement, tous plus désagréables les uns que les autres, mêlant mort et bain de sang, avec entre autre toujours ce même visage qui avait bercé son enfance et maudit son avenir. Le regard du vampire s'assombrit brusquement alors que Philomène se dirigeait déjà vers l'entrée. Il ferma alors les yeux, immobile, humant les environs, un parfum qui le ramena l'espace de quelques instants sept ans plus tôt, croyant même entendre la voix de Philomène lui criant de se dépêcher de rentrer. Chimère. Un fantôme du passé, la Philomène qu'il connaissait aujourd'hui n'était plus la même. Lui jetant un bref regard rempli d'indifférence, il se mit en marche, envahit par un sentiment mêlant crainte et excitation... Le coeur battant, le vampire, droit et noble parcouru l'allée principale, traversé par un vent de nostalgie, regrettant cette époque où il parcourait encore naïvement le jardin pour accueillir dans ses bras une soeur enjouée et bercée des nombreuses illusions que vous apporte l'innocence.
Il monta ensuite les marches pour traverser le hall où Philomène venait de se précipiter, calme, mais surtout troublé malgré ce que les apparences laissaient dire. Inexpressif et silencieux, le vampire observait sa demeure sans y apporter de réels impressions; seuls son regard violacé laissait entendre ses pensées: la satisfaction, voilà ce que l'on pouvait y lire sans mal...
Jetant un rapide coup d'oeil à la jeune femme qui se précipitait dans les escaliers, il cru revoir la fillette monter les marches quatre à quatre au milieu de cadavres ensanglantés. Il ferma alors un instant les paupières tandis qu'un faible sourire éclairait son visage, il allait reprendre la succession...Et "le" tuer. Car la vengeance restait bien aujourd'hui son ultime bataille, il attendrait le bon moment... Il le savait, tuer un sang pur était un crime, et pourtant... Rien au monde aujourd'hui n'avait plus d'importance de la mort de cet homme, de cette famille qui leur avaient fait du tort sept années plus tôt.
Ezechiel, immobile, face aux escaliers se tourna alors vers un comité d'accueil irréprochable qui attendaient déjà les ordres du nouveau Maître, l'émotion les submergeant soudainement. Le vampire les salua alors, insensible à leur joie qu'ils semblaient avoir tant de mal à contenir, ils pouvaient disposer. Le jeune homme, glacial, tourna alors le talons pour revisiter quelques pièces de cette immense demeure qui avait été la sienne... C'était comme avant, rien n'avait changé si ce n'était les quelques meubles endommagés par l'incident, remplacés par des similaires. Au milieu du salon, le nouveau Maître des lieux effleura du bout des doigts ce fauteuil où il avait si souvent passé ses soirées en compagnie de sa chère soeur. Rien n'avait changé, il se dit alors que tout pourrait redevenir comme avant. C'était possible après tout, revenir en arrière...Retrouver "cette" Philomène.
Un sourire illumina l'air ombrageux du vampire, avant de retourner en direction du hall où il croisa le regard de Philomène où il n'y lu que ressentiment à son égard. Non. Les ténèbres s'emparèrent de nouveau d'Ezechiel qui regrettait maintenant d'avoir cru un instant pouvoir revenir en arrière.

Tout avait changé.

"Tu souhaites récupérer ta chambre?"

Froid... Pourquoi avait-il commencé par lui poser une telle question? Autrefois il en aurait été autrement, mais décidément, rien n'était plus comme avant, leur discussion se limitaient aujourd'hui à ce genre de propos sous forme de questions/réponses. N'aurait-il pas pu lui adresser quelques paroles réconfortante comme il l'aurait fait auparavant? Trop difficile à présent sans doute...

Seconde inspiration.

- Tu souhaites récupérer ta chambre ?

Philomène s'apprêtait à répondre quelque chose du genre : Qu'est ce que tu crois ? Je viens de demander à ce qu'on dépose mes affaires dans MA chambre.

Mais elle venait de penser que son frère n'avait toujours pas mis les pieds en haut. Elle avait envie d'hurler, de le frapper. Au lieu de ça, elle serrait juste les poings. Pourquoi gardait t'il ce visage vide ? Il ne pouvait pas avoir un semblant de tristesse, une once de désespoir ?
Il prenait un visage froid, comme les sang pur prenne d'habitude dans les grandes réceptions.

La jeune femme détestait l'idée que son frère ne soit plus jamais comme avant. Peut être avait t'elle songer, en l'espace d'une seconde, qu'au moment ou il poserait son pied dans la propriété, il redeviendrait comme avant.
Mais non. Et puis, de toute façon, les faits présents font que Philomène ne regardera jamais son frère avec gentillesse.

Alors, elle répondit d'une voix sèche :

- Oui. J'ai demander à ce qu'on dépose les affaires là-bas.

Rien de plus, rien de moins. Elle savait que cette réponse suffirait amplement à son frère, et qu'il n'en demandait pas plus.
Comment allait se dérouler la soirée ? La journée de demain ? Les semaines à venir ?
Surement son frère passera moins de temps au domaine. Après tout, il devrait avoir pleins de choses à faire, d'occupation et surtout de fille à courtiser.

Philomène songea un instant à ses amies de quand elle était jeune. Elle repensait à ses moments privilégiés qui lui on été retirés.
C'était injuste...

Deux personnes du personnel s'approcha des deux vampires.

- Que souhaiteriez vous manger, ce soir ?

Philomène pinça les lèvres et lui lança un air de dégout. Elle tourna les talons pour se diriger vers la salle de réception. Au plafond, un immense lustre était toujours accrocher.
Elle y vit la couche de poussière qu'il y avait déposer dessus.
Et elle compris alors que les personnels n'étaient arrivés qu'il y à quelque chose. Une femme entra en trombe dans la pièce pour essayer de nettoyer le magnifique objet.

Philomène fit de nouveau demi tours. Elle alla dans le salon, et s'assit à l'endroit exact ou elle était le soir du drame. Elle pris dans le tiroir un paquet de cartes. Le crépuscule fit qu'à ce moment la, un rayon de soleil passa entre les cartes et les yeux gris de la jeune femme.

Le jours s'éteint...

- Oui. J'ai demandé à ce qu'on dépose les affaires là-bas.

"Bien."Répliqua t-il avec cette placidité habituelle en ignorant le ton sur lequel elle lui avait répondu, c'était devenu une habitude...

Quelle était donc cette atmosphère si tendue? Quand donc s'était elle installée entres eux deux? Ezechiel ne s'en était pas rendu compte lui-même. Il avait pourtant essayé de sauver les apparences, mais en vain, il n'en était à présent plus capable et redevenir celui qu'il était avant demandait un effort qu'il n'était plus en mesure de faire. Les yeux braqués sur Philomène qui descendait les escalier, il se tourna alors vers le personnel du château qui s'exécutait déjà à la tâche. Le vampire les observait, le regard dur et dénué de toute sensibilité, un regard qu'il adoptait aujourd'hui non plus seulement en public, mais dans sa propre demeure... S'ensuivit une sensation chaude, celle résultant d'un nouveau pic de colère qui bouillonnait à présent en lui, ces individus ne les connaissaient pas. Bien sûre, ceux les ayant connu plus jeunes ayant péri lors de ce malheureux "incident", ils avait fallu les remplacer. Peut-être était-ce pour cela que cet endroit lui semblait si étranger, les visages avaient changé, les sourires manquaient de spontanéité et ne reflétaient au fond que de la crainte. Etaient-ils donc si effrayant que ça? Les sang purs inspiraient la terreur chez certains vampires, pourquoi avait-il fallu employer des "nouveau nés" tout droit sortis du "berceau"?

- Que souhaiteriez vous manger, ce soir ?

Le vampire posa le regard sur la jeune femme à ses côtés, attendant une réponse de sa part, mais elle n'en fit rien, et se contenta de se retirer, ne manquant pas d'exprimer aux nouveaux arrivants l'expression de ses plus sincères sentiments. La belle était irritée... Quel dommage, ce jour aurait pourtant du être l'un des plus heureux de leur existence.
Ezechiel se tourna ensuite de nouveau vers ses sujets pour leur adresser un sourire aimable et bienveillant: un excellent comédien, comme toujours.

"Surprenez-nous"

Il aurait été inutile de les mettre plus mal à l'aise qu'ils ne l'étaient déjà... Le visage des deux domestiques s'illuminèrent alors, en oubliant presque la réaction déplacée de leur Maîtresse précédemment. Il était si simple de tromper son public...Ca l'était beaucoup moins en présence de Philomène, qui, elle, le connaissait mieux que personne, du moins, ça avait été le cas...
Leur faisant signe de disposer, Ezechiel traversa le salon afin de rejoindre sa soeur qui ne semblait guère apprécier ce retour. Le vampire avait beau avoir changé de comportement à son égard, il s'inquiétait toujours autant intérieurement pour sa cadette, sans doute l'Etre qui lui était encore le plus cher. L'observant en silence, curieux, il la vit prendre un jeu de carte dans un tiroir avant de s'asseoir au même endroit qu'il y avait sept ans. Des souvenirs surgirent de nouveau, cette soirée si paisible, un instant qu'il aurait voulu faire durer une éternité. Le regard furtif, il finit par contourner le siège de sa belle avant de s'installer en face, sur ce même fauteuil que sept ans plutôt.
Le même théâtre, les mêmes acteurs, mais un jeu différent.
Un jeu moins moins sans doute, avec des comédiens manquant sans doute de naturel. L'atmosphère lourde et pesante entravait le bon vouloir d'Ezechiel qui aurait voulu revenir sept ans en arrière, retrouver ces bons moments qu'il avait partagé avec la belle inconnue qui lui faisait aujourd'hui face. Non, avec elle, il était impossible de jouer la comédie, il n'y parvenait tout simplement pas.

"Une nouvelle partie...?"

Cette fameuse phrase, elle faisait écho, comme il y a sept ans. Ezechiel venait une nouvelle fois de perdre face à Philomène, elle ne connaissait que trop ses tactiques de jeu, elle ne se laissait plus berner. Même sa voix était redevenue douceur et chaleur l'espace d'un instant, comme auparavant.
Le même théâtre, les mêmes acteurs.

Ezechiel rejoignit sa soeur dans le salon. Les jambes en tailleur, Philomène regardait le jeux de cartes. C'était le même. Il y avait la même carte déchirée au sept de trèfle et le même bout un peu corner au trois de carreaux.

Tremblante, elle ne leva pas les yeux de son frère, de peur qu'une larme roule de sa joue.

« Une nouvelle partie ? »

Alors, Philomène leva les yeux vers son frère.
Son frère.. Cette personne qu'elle considérait a présent comme un inconnu.
Qui était t'il ? Que faisait t'il devant elle ?
Pourtant, dans ses yeux bruns, Philomène vit une lueur, une toute petite lueur du passé. Une lueur qui n'avait pas changer. Une lueur rappelant l'adolescent réservé mais protecteur, sept ans plus tôt...

Cette voix.. Ce n'était pas celle de l'homme froid devant elle. C'était la voix d'un garçon, gentil et doux.
Et philomène n'était pas la même. Elle était redevenue l'enfant insouciante.

Machinalement, Philomène distribua les cartes. Elle ne se rendait pas vraiment compte de ce qu'elle faisait.
Ce n'est que quand elle s'en empara pour les voir, qu'une larme coula.
Puis une seconde.
Puis une troisième.

La gamine lâcha son jeux de carte, qui s'éparpillait sur ses genoux et sur le sol. Elle se leva, les yeux baissés, la main portée à sa bouche. Elle sortit de la pièce en courant, refoulant ses larmes qu'elle n'arrivait plus à contenir.
C'était trop dur...

Elle cherchait ou aller. Il y avait trop de personnel, partout !
Des gens, faussement ridicules.

- Poussez vous ! Hurle philomène, les yeux baignés de gouttelettes salées.

Elle grimpa les marches quatre à quatre pour arriver dans sa salle de bain privée. Elle entra, et ferma le verrou derrière elle.

Elle avait abandonné son frère, une nouvelle fois.

Que faisait t'elle ? Détestait-elle son frère ou l'aimait t'elle à un point inexprimable ?

Les deux à la fois, sans doutes...

Allait-elle jouer le jeu?
...
Ezechiel eut rapidement réponse à sa question, souriant intérieurement à la vue des cartes qu'elle commençait à distribuer, un sourire dont personne ne prendra jamais connaissance, dissimulé derrière ce masque noble mais inexpressif. Doucement, machinalement, il répéta les mêmes gestes que quelques années plus tôt. Il n'avait pas oublié, il se l'était interdit. Les cartes en main, il s'enfonça alors confortablement dans son fauteuil, observant son jeu sensiblement différent. Plus rien ne comptait à ses yeux excepté ce moment qui avait marqué sa vie, oubliant même durant quelques secondes la rancoeur qui l'habitait et qui ne l'avait pas quitté une seule fois ces sept dernières années.
Il releva alors les yeux, le regard moins dur qu'à l'habitude, jetant un coup d'oeil à sa soeur avant de remarquer ce visage larmoyant qu'il n'avait eu l'occasion de voir depuis bien longtemps...Elle pleurait? Il plissa alors légèrement les yeux, entrevoyant la fillette d'antan, morte il y a sept ans. Immobile, il la regarda se lever, surprit, avant qu'elle ne s'enfuit, le laissant seul en compagnie de ces vestiges du passé, ce puzzle qu'ils venaient de tenter de reconstituer, en vain. La château de cartes s'était effondré, l'espoir du jeune homme également.
Appuyé sur l'accoudoir du fauteuil, le Maître porta alors sa main contre son visage, les cartes toujours en main. L'image de Philomène ne le quittait plus, avait-il définitivement tout détruit? Etait-ce sa faute? Sa culpabilité grandissait. Doucement mais sûrement, le vampire, sans même s'en rendre compte entrouvrit les lèvres, laissant ses canines pénétrer avec avec nonchalance la chair de son poing, laissant quelques gouttes s'écouler sur les cartes de son jeu. Le regard sombre où brillait à présent une lueur de colère adressé à lui-même, il était ailleurs. Il entendit seulement sa soeur hurler à travers la château avant de s'enfermer à l'étage. Un domestique entra alors, amenant le plat si attendu...Si surprenant qu'attendait le vampire. Tremblotant, il servit une coupe au vampire qui ne semblait guère y porter une quelconque attention, du moins jusqu'à qu'il ne retire ses crocs de sa peau blafarde pour tendre la main, prête à accueillir la coupe que son domestique lui tendait. Il la porta alors à ses lèvres, le regard fixe, vague, observant le vide, avant de la reposer avec un calme affligeant, anormal, effrayant...

Il se retira, sans même porter attention au plat, et monta les escaliers pour la première depuis sept ans, l'air sombre, guidé par les pleurs de Philomène qui faisaient échos à travers tout l'étage. Il s'arrêta devant la porte de la salle de bain mais se résigna à frapper à la porte...

"Ca ira?"

La bienveillance et la douceur qui l'habitait un peu plus tôt avait disparu, envolés, pour faire place à une voix plus froide et moins avenante... Cet instant passé au milieu du salon s'était finalement évanoui. Il aurait voulu s'excuser, mais rien ne sortit de sa bouche excepté cette chose immonde qu'un inconnu aurait tout aussi bien pu lui dire. Impossible, la colère avait reprit le dessus.

Les larmes redoublaient. C'était difficile de se rendre à l'évidence.
Ezechiel et Philomène étaient morts. Mais au moins, ils étaient morts ensembles.

Recroquevillée dans un coin, les jambes repliés, tête sur les genoux, bras autour des chevilles, ses larmes coulaient maintenant sans bruits. Elle essayait de respirer, mais ce n'était que des sanglots qui sortaient.

Elle entendit une voix, moins paisible que dans le salon.

- Ça ira ?

Si ça irait ? Philomène ne le savait pas elle même. Elle savait juste que le passé se mêlait de plus en plus avec le présent.
Elle n'aurait jamais dut revenir...

Mais là, elle pensait surtout au regard de son frère, quelques secondes plus tôt. Le même regard qu'il y à sept ans.
C'était ce regard qui manquait tant à la jeune fille. Ou était passer ce regard ? Allait t'il revenir ?

Philomène se redressa, se sécha rapidement les yeux, même si quelques larmes coulaient encore. Elle hésita quelques secondes, avec de tirer le loquet.
Devant elle, son frère. Debout.

Elle sentit l'odeur de sang très rapidement, et jeta un oeil rapide sur son bras, aux deux traces de morsures de crocs.

Elle s'approcha de lui et lui pris la main. Pas sèchement, pas violemment.
Elle le porta à ses lèvres, et, du bout de sa langue, enleva les gouttes de sang qui restait pour nettoyer la plaie.
Elle se retira, relâcha la main, et le regarda.

Combien de temps restèrent t'il ainsi à se regarder ?

Philomène attendait une réaction de la part de son frère.
Une parole. Elle attendait une parole.
Qu'elle soit gentille ou méchante, la gamine s'en foutait terriblement.
Elle voulait juste entendre le son de sa voix.

Dehors, le soleil se couchait enfin. L'obscurité envahissait la pièce peu à peu. Les pupilles de Philomène s'agrandissait.

Ses yeux voyaient mieux, mais son esprit ne voyait rien.
Elle était aveugle. Aveugle d'amour et de peine.

Alors, elle ouvrit la bouche :

- Eze...chiel.

Juste ce prénom. Le prénom.
De son frère. C'était ainsi. Elle avait un frère, qu'elle le veuille ou non.
Elle l'avait toujours sût, mais l'avait oublier.

Une dernière larme coula le long de sa joue. Elle attendait.

S'attendait-il à ce qu'elle lui ouvre la porte? Sûrement pas, le fossé qui les séparait aujourd'hui était bien trop large et profond. Ils ne se comprenaient plus. Cette époque où chacun était encore en mesure d'anticiper chaque fait et geste de l'autre était révolue, non, là, maintenant, Ezechiel était désarmé, essayant de comprendre tant bien que mal ce que pouvait ressentir sa moitié,ce qu'elle pouvait attendre de lui à cet instant. La réponse aurait du venir, mais rien, un vide comblé par de nouvelles interrogations, toujours plus grandes.

Les yeux rivés sur ce visage encore marqué par les larmes, le vampire renfermé sur sa propre amertume la regarda avec attention prendre sa main pour y effacer les dernières traces de sang qui trahissait de la plus simple des manières la colère du sang pur refoulée et sublimée. Ezechiel se laissa faire, sans quitter des yeux sa protégée qu'il ne savait plus comment faire sourire. Même le plus pur et le plus chaste des enfants de coeur en guise de présent ne suffirait pas à réparer ses erreurs. Quelque chose s'était bel et bien brisé, et pourtant, là, maintenant, il osait encore espérer recoller les morceaux. Un faible espoir submergé par un océan de doutes et de remises en question.
Une faible lueur brilla dans les yeux du vampire, à présent rougeoyants et plongés dans ceux de Philomène. Le temps aurait pu s'arrêter. Il avait l'impression de retourner en arrière. Les yeux flamboyant, la pièce s'obscurcissait peu à peu, ne rendant les yeux du sang pur que plus sanglants qu'ils ne l'étaient auparavant. Un regard sanguinolent à la fois glacé et imprégné de passions qui, entremêlées inspiraient quelque chose d'horriblement malsain: haine, colère, vengeance, et bien sûr amour. Un regard aussi terrible que magnifique, que les mots ne sauraient même décrire. Comment aurait-il pu mieux lui transmettre ses sentiments?

Au son de sa voix, le sang pur ne su quoi répondre, silencieux face à l'intensité de leur échange, un contact d'une intensité telle que seuls les vampires pourraient comprendre, un type d'échange inconnu des humains, moins passionnels. Il aurait voulu la serrer dans ses bras, l'embrasser, mais une force invisible l'en empêchait, seule chose qui le retenait encore. Il ne pourrait plus se concentrer sur le but qu'il s'était fixé si il était amené à répondre à l'appel de sa soeur. La vengeance restait ce qui l'animait encore, il se devait de se racheter auprès de sa famille qu'il n'a jamais su réellement protéger.

Doucement, le vampire se pencha en avant et se baissa à la hauteur de Philomène, plus petite. Il porta alors sa main derrière la tête de la jeune femme avant de lui déposer un baiser dépourvu de chaleur sur le front, un baiser doux et glacé, à l'image du vampire en cet instant qui ne savait plus à quoi donner sa priorité. Un geste spontané, exceptionnellement sans aucun calcul de sa part, qu'il n'avait pas adressé à Philomène depuis déjà bien longtemps. Puis, toujours avec cette délicatesse oubliée, le vampire , effleurant le visage de la vampire à l'aide du sien, celui-ici finit par déposer un deuxième baiser sur les lèvres de la jeune vampire, un geste tout ce qu'il y avait de plus fraternel.

Ezechiel se redressa ensuite, une teinte pourpre imprégnant son regard avant de se figer de nouveau, s'inscrivant une fois encore dans l'indifférence. Il ne pouvait faire plus, c'était au dessus de ses forces.

Déchiré entre deux extrêmes

Incapable de lui dire hélas quoi que ce soit,de peur de s'égarer, il se retira sans un mot, endossant une fois de plus le rôle qui était aujourd'hui le sien, et non plus celui du frère dont il ne restait à présent que quelques traces, fugaces et discètes. Traversant le couloir avec cette démarche habituelle qu'il adoptait autrefois seulement en présence d'autres vampires, on fit signe aux domestiques d'apporter le repas à leur Maîtresse que cet homme s'apprêtait à laisser seule, une fois de plus, pour se noyer au milieu d'un océan de sang...

Philomène essayait de percevoir un regard, une ombre d'affection, juste un petit mouvement du visage.
Mais rien. Il restait droit, sans bouger.
La gamine avait le coeur serrer. Quand son frère allait t'il revenir ? Pourquoi le rôle d'héritier avait t'il changer sa vie ? Pourquoi le passé les avaient tant changés, tous les deux ?

La haine, la colère, l'envie de vengeance...

La vampire s'apprêtait à passer devant son frère, et redescendre les marches de l'escalier, mais il bougea à ce moment là, passant sa main derrière sa nuque.
Philomène essayait de ne pas bouger, mais les battement de son coeur étaient tellement fort que sa respiration en était saccadée.

Il déposa un baiser glacial sur le front de la jeune femme. Philomène ferma les yeux, et après le deuxième baiser, elle les rouvrit.
Pendant ses quelques secondes, l'âme de philomène avait changer... Elle avait de nouveau 10 ans, en cet instant.

Ezechiel fit demi tours. Philomène voulait l'en empêcher. Elle voulait rattraper le temps perdu. Il s'éloignait déjà, pas après pas..
Il allait descendre les marches, cet incident de sera plus qu'un souvenir, il sera ignorer si Philomène ne bougeait pas.

La gamine était paralyser. Elle ne pouvait faire un geste, elle ne parvenait pas à bouger, à parler.

Mais quand elle vit que la silhouette de son frère – son frère ! - s'éloignait de plus en plus, elle réagit. Elle fit quelques pas, de plus en plus rapide. La luminosité était absente. La jeune femme ne voyait plus les meubles autour d'elle. Elle ne voyait plus les pièces, plus les murs.
Elle ne voyait que l'ombre de son frère.
Elle ouvrit ses bras et les referma autour d'Ezechiel. Elle posa sa tête dans son dos, et s'accrocha à son frère. Elle ne voulait plus le laisser s'enfuir.
Elle ne voulait plus...

Les yeux clos, elle respirait l'odeur agréable de son frère. Celle-ci n'avait pas changer, en sept ans. C'était toujours l'odeur douce et agréable de vampire qu'il avait.

- Ezechiel... Je t'en supplie, redeviens comme avant...

Ses simples paroles tombèrent comme une pierre.
Elle ne pouvait pas les rattraper. Elle les avait bien prononcés.

Héritier ou non, son frère était son frère.

Le regard vague, le vampire s'apprêtait à descendre la première marche des escaliers, tournant définitivement le dos au vampire d'antan. Du moins il aurait du, si il n'avait pas été surprit par ces deux mains familières qui l'enveloppait à présent, l'étreignant comme jamais elles ne l'avaient fait auparavant. Le vampire baissa les yeux, s'attardant sur ces mains fines et pâles qui agrippaient à elles deux fermement la chemise du sang pur, qui, le coeur soudainement serré hésita un instant avant d'apposer la sienne sur celles-ci. Une main froide, sans chaleur qui se voulait pourtant rassurante.
Regardant droit devant lui, sans sciller, il resta un instant silencieux, en proie à une sensation étrange. Il doutait; Mais de quoi? Ce contact charnel, longtemps absent au sein de ce duo autrefois inséparable réveilla une flamme au fin fond du coeur du vampire. Un flamme incandescente et sauvage, douce et douloureuse. Une flamme éteinte depuis bien trop longtemps déjà.
La main du vampire se referma alors sur celle de sa soeur, toujours agrippée à lui, la serrant un moment, il l'aimait tant...

Elle lui demandait l'impossible, plus, elle le suppliait. Cette idée lui fit l'effet d'un coup de poignard, était-elle si désespéré que ça? L'homme qu'il était devenu était donc si haïssable? Tout ce qu'il faisait aujourd'hui, c'était pour elle, pour sa famille. Aurait-elle préféré qu'il oublie et continue de vivre caché? Ce soir là avait signé l'arrêt de mort du vampire, mort en même temps que cette gouvernante et ses parents. Oui. Ce soir là, le vampire inutile et lâche avait bel et bien disparu, enfermé à jamais dans la mémoire du nouvel Ezechiel. Tout ce sang versé ne resterait pas vain...Il s'était aujourd'hui beaucoup trop sali les mains pour oser tenter un retour en arrière. Il avait changé, il n'y pouvait rien.

"Ne sois pas stupide Philomène..."

Il la protégerai, coûte que coûte, mais ne redeviendrait pas le lâche d'autrefois, se dissimulant sous une table pour observer la femme qui l'avait élevé se vider de son sang sous ses propres yeux, sans agir. Cette nuit avait tâché et noirci le coeur du sang pur. Bien léger à l'époque, il pesait aujourd'hui. Le poids de la culpabilité et de la haine, une haine qui l'avait finalement conduit à faire couler le sang à son tour. Revenir n'était plus possible, il était déjà allé beaucoup trop loin...

"Les gens changent, c'est un fait, accepte le."

Le visage du vampire s'assombrit alors, était-il responsable de la situation actuelle? La voix dur et appuyé, il se tut alors, le regard sinistre, se répétant qu'il avait pris la bonne décision. Il aurait voulu se retourner et la rassurer avec le regard bienveillant qu'on lui connaissait par le passé. Mais il n'en fit rien, écoutant sa raison et non plus son coeur.
Doucement, il enveloppa la main de sa soeur à l'aide de la sienne pour la porter à ses lèvres, un dernier geste affectueux. "Ne m'en veux pas" auraient été les mots qu'il voulait prononcer à ce moment précis, en vain, il les garda pour lui... Sur ces pensées, le vampire se détacha peu à peu de la jeune femme , lui adressant un bref regard qui ne signifiait plus rien maintenant.

Il la protègerai, coûte que coûte...

Philomène sentit une main se joindre a la sienne. Elle inspira l'odeur agréable de son
frère, pleine de nostalgie...
Cette main qui lui avait tant manquer depuis si longtemps... Elle n'espérait pas retrouver
son frère, mais reprendre un peu de lui...

« ne soit pas stupide, philomène. Les gens changent, c'est un fait, accepte-le »

La jeune femme resta la encore un petit moment, la main de son frère contre la sienne. Elle souriait intérieurement...
Elle aurait aimer avoir de meilleures retrouvailles. Différentes.

Mais c'était ainsi.
Et c'était déjà beaucoup...

Elle détacha sa main de son frère pour lui prendre le poignet, et avancer.
Elle le tira dans les escaliers, jusqu'en bas. Les domestiques les regardaient étrangement. Philo leurs lança un regard peu amène, et avança jusqu'à la salle à manger. Elle s'assit, entrainant son frère devant elle.
Les plat fût apporter. Philomène ne jeta pas même un regard, ni à l'assiette, ni au cuisinier.
Ses yeux étaient dans le vague, pensant à la scène
qu'elle venait de vivre.

Il fallait qu'elle aille vers l'avant... Qu'elle cesse de se retourner vers le passé. Même si c'est dur, elle devait y arriver...

Elle n'adressa plus une seule parole à son frère de tout le repas. De simples regards de temps en temps, seulement. Des regard doux, chauds, mais en gardant cette lueur de haine dans ses yeux.
Philomène repensa aux paroles de son frère, quelques minutes plus tôt.

Les temps changent aussi. C'est un fait.
Et demain est un autre jours...

Fin du post.

» Après la Diète. [PV :Krness]